L’écriture :
Marie-Aude, pourquoi écris-tu ?
Ecrire est pour moi un mouvement naturel. Mais la vraie question semble plutôt être, pourquoi vouloir être publiée ? J’écris pour être lue et donc être publiée. Pourquoi vouloir être lue ? Pour être écoutée, être aimée, dire des choses importantes aux autres…
Je suis une personne qui a peu d’énergie pour écrire, il faut donc que je fasse attention à ne pas me disperser. C’est un désir fragile qui me demande beaucoup d’effort.
Que penses-tu des écoles américaines dans lesquelles on peut apprendre à écrire ? En France, elles n’existent pas. Quel écrivain es-tu ?
C’est un métier qui s’apprend ! On perdrait moins de temps si nous étions formés. Pour ce qui me concerne, j’ai appris dans les livres des autres. Ainsi, j’ai « dépecé » des livres policiers avant d’en écrire. Toutefois, le risque de ces écoles est le formatage, de vouloir construire des best seller en appliquant des « recettes. »
Arthur Ténor parle de lui comme étant un « explorateur de l’imaginaire. » As-tu une formule pour te caractériser ?
Je déteste que l’on me range dans une case !
L’écriture a-t-elle toujours été en toi ou est-ce quelque chose qui est arrivé tardivement dans ta vie ? Il y a t-il eu un élément déclencheur ?
J’ai toujours voulue lire, écrire, créer : la seule chose qui m’inquiétait, c’était de ne pas m’y mettre. J’ai vite écrit pour ma petite soeur. Par la suite, en faire un métier fut plus dur. Au départ, il y a tout de même papa et maman, une famille d’artistes pour laquelle, le monde la création était quelque chose de très important. Ecrire, c’est un débordement d’égo (Jules Renard), un besoin de reconnaissance, une quête. Et comme j’ai de l’ambition…
Le public/l’éditeur t’ont-ils influencé à un moment donné ?
Je tiens compte de l’avis de l’avis du public, de mon éditeur pour écrire. C’est en pensa nt à mes lecteurs que je trouve mon écriture, une écriture efficace.
Cette fameuse imagination, d’où vient-elle ? De quoi t’inspires-tu ?
De l’information, je suis surinformée ! Je me tiens au courant de tout ce qui se passe. Je suis quelqu’un de silencieux ce qui me permet de pouvoir beaucoup écouter les autres.
Quand j’ai une thématique en tête, je pose des questions, je vais voir sur place : je me rends dans une entreprise de transport, je suis un médecin, j’accompagne une maîtresse d’école pendant cinq années (Vive la République !), je participe à la journée d’une classe de 3ème : je prends en notes, des phrases d’enfants... Les gens se mettent facilement à ma disposition ; ils sont contents lorsque je leur dis que je suis écrivain pour la jeunesse. Dickens était un homme de terrain : il s’est rendu sur place pour décrire les écoles du Yorkshire qui étaient de véritables mouroirs. Ses écrits ont permis de les faire fermer !
Tout part d’une bonne idée, du désir d’écrire une bonne histoire et malgré moi je deviens une sorte de porte-parole (ainsi lorsque j’écris sur la garde à vue). Au cours de mes recherches, l’indignation me prends mais je ne me vois pas comme un écrivain militant.
Comment procèdes-tu pour écrire ? Un plan ? Des carnets ?
Tout dépend du type de récit auquel je travaille.
Si je dois écrire pour le magazine J’aime Lire, je rêvasse, allongée sur mon lit dans le but de trouver une histoire qui m’amuse, oui car il faut que cela me fasse rire, les chose se feront simplement quoi que…
S’il s’agit d’un roman historique, les choses seront évidemment bien plus longues, de nombreux travaux de préparation seront nécessaires. D’autres romans nécessitent de se rendre sur le terrain, le roman policier pose des problèmes d’intrigues…
Une chose est sûre : je n’aime pas tout savoir au départ ! Dans « Oh, boy ! », je ne savais ce que j’allais faire du petit garçon leucémique, Siméon devait-il mourir ? Vivre ? En tout cas, je fais au mieux pour mes personnages j’essaye de les sortir d’affaire, de les faire grandir mais le réalisme s’en mêle, l’intrigue s’en mêle… Les romans de littérature jeunesse sont souvent des romans d’apprentissage.
A quel moment de la journée écris-tu ? Avec quoi ? Une heure précise ?
As-t besoin d’isolement ?
Je peux rester des mois sans écrire ! Ecrire n’est pas pour moi un besoin au même titre que lire. L’écriture est un métier à risque, du jour au lendemain cela peut vous quitter.
Non, je n’ai pas de rituel, j’écris n’importe où, n’importe comment. Le tout est que j’en ai envie.
Qui te lis en 1er ? Un proche ? Pourquoi ?
Mon mari ! Mais il ne lit pas tout de suite. Parfois, il lit en cours de route… selon le livre. Il sait, qu’au départ, il ne doit formuler aucune critique du moins jusqu’à un certain point. Car au début, j’ai très peur.
J’écris d’abord à la plume sur un cahier, illisiblement, peut-être par peur, par manque de confiance.
En fait, aucun de mes romans n’a la même histoire. Pour « Miss Charity », mon mari l’a lu au fur et à mesure - ce qui n’est pas le cas pour les autres romans - peut-être parce que l’écriture, la construction de celui-ci fut facile. J’étais comme portée : l’histoire est linéaire (l’héroïne a 5 ans, grandit, devient adulte…) ce qui est loin d’être le cas, par exemple, dans les romans policiers.
Le vrai problème est de trouver le ton, de trouver les bon réglages : qui parle ? « Je » ? « Il » ? Quel temps employer ? L’imparfait ? Je change, je recommence…
Qu’aimerais-tu écrire ? Un sujet que tu n’as pas abordé et qui te taraude ? Un genre ?
J’ai des tas de sujets qui sont dans des dossiers pour lesquels je n’y arrive pas. Je voudrais écrire du théâtre, un scénario de BD.. Tous les genres m’intéressent.
Pourquoi avoir participé à cette extraordinaire expérience de l’écriture à… six mains ?
Oui, une sacrée aventure qui a duré deux ans ! Mais qui ne fut possible que parce qu’il s’agissait de Lorris, mon frère et d’Elvire, ma sœur. Ce défi fraternel fut éprouvant même si nous ne nous sommes pas disputés, en tout cas nous voulions arriver eu bout, « Golem » est né de cette envie. En tout cas, nous ne recommencerons pas. Enfants nous jouions beaucoup tous les trois, cette expérience fut aussi une façon de continuer à « jouer » ensemble après le décès de maman.
· Qu’as-tu retenu de cette expérience ?
Qu’écrire s’apprend ! Qu’écrire s’apprend avec des gens du métier. Tout professionnel te débusque facilement, connaît rapidement toutes tes petites astuces. Un professionnel est sévère dans son jugement, les échanges que nous avons eu m’ont évidemment permis d’apprendre. Tout comme j’ai appris des éditeurs, des scénaristes…
Est-il facile de vivre de sa plume ? Exerces-tu un autre métier ?
Pour moi, oui ! C’est une réalité mais dire que c’est toujours simple serait mentir. L’idée que je doive faire autre chose est inconcevable. Ecrivain est un métier à risque ! De plus, l’attaque actuelle contre les droits d’auteurs m’inquiète.
Qualités et défauts de la Femme qui rejaillissent sur l’écrivain ?
Être à la fois écrivain et femme est un inconvénient majeur : j’ai des enfants et je veux être une mère à 100% ! L’écriture c’est du temps « arraché » à mon devoir de mère MAIS je n’écris des livres que parce que je les aie eu ! Mes enfants m’ont donné du matériau pour écrire et une proximité avec le public auquel je m’adresse.
· L’écriture de scénario. Que retiens-tu de cette autre expérience ?
J’aime apprendre ! Ce fut à la foi un plaisir et une galère : j’ai dû écrire 10 ou 12 fois le texte. C’est une autre école, une grande école d’écriture. J’ai appris quant à la façon de mener l’intrigue par contre cela ne m’a rien apporté au niveau de l’écriture. Je n’y retournerai pas car ce n’est pas ma vocation.